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Pont. Bateau. Rêve d'un passager : un homme est couché sur un radeau. Sa main est posée sur une guitare. Il caresse les cordes et la caresse crée des sons : un lied de Schubert. Du visage de l'homme émane une expression amoureuse. Son corps se rapproche de plus en plus de la guitare qu'il étreint, comme une femme. Le rêve est présage : le parcours initiatique du passager prendra la forme de la mise au monde d'un chant. Cette séquence initiale, d'une grande intensité sonore, est rythmée par le retour d'un sifflement de corne de brume dans la nuit.

Réveil du passager. Des sacs de couchage sont posés sur le pont du bateau. Une guitare repose contre l'un d'eux. Le passager tâtonne à la recherche de ses lunettes, allume une cigarette, et fixe le paysage : la mer sur laquelle s'élève une bande de terre est éclairée par la lune. Le passager échange quelques mots avec les marins qui travaillent à transporter de lourdes caisses d'un bateau à l'autre. A la question du passager ("0ù sommes nous ?"), les marins répondent : "c'est Anticythère". . . " Une petite île sans confort : pas d'électricité, pas de télé, pas de voiture, seulement un magasin"… Nous devons nous arrêter pour apporter de la nourriture aux habitants de l'île"..."Il y a deux mois, lorsque nous sommes arrivés, l'île entière était en feu pendant la nuit". Mu par une étrange nécessité, le passager s'écrie : "je veux débarquer ici". Pendant, tout le dialogue on continue à entendre, à intervalle régulier, le sifflement de corne de brume. Le passager ne tient pas compte des menaces des marins qui cherchent à l'empêcher de débarquer dans l’île. Il quitte le bateau, dont la lourde porte se referme comme une pierre sur un tombeau. Les silhouettes des habitants de l'île se rapprochent de la jetée. Sept lampes électriques sont braquées sur le passager qui débarque. On entend les voix des habitants d'Anticythère qui dévisagent l'étranger: "un des marins a dit que c'était un fou".

La descente du passager dans l'île coïncide avec la rencontre du policier alerté par les vieillards inquiets de l'arrivée de 1'étranger. Nikos pose au passager la question qui structure tout le film : 'La question de l'identité, que ne résout ni la découverte du nom de l'inconnu (François-René) ni celle de sa profession (écrivain). L’identité de François-René est en avant de lui : il la découvrira à Anticythère. Nikos donne à François-René les clés de la chapelle de l'île et l'invite à déjeuner chez lui. Il raconte à François-René l'histoire d'Anticythère : "Une île peuplée presque seulement par des vieillards. C’est le résultat de la politique gouvernementale. Ils évitent le dépeuplement en garantissant 10 000 drachmes par habitant, chaque mois. Surtout Nikos raconte sa propre histoire : solitude ("ma femme et ma petite fille vivent à Athènes"..." je n'ai pas le droit de quitter Anticythère, je suis le seul policier de l'île et je fais tout ici. J'ai encore un an à tirer... On m'a promis un poste important à mon retour") et amour des livres ("le temps vole lorsqu'on lit, n’est-ce pas?"). François-René expose à Nikos le projet du livre qu'il veut écrire, ici, à Anticythère. Figure paternelle initiatrice, Nikos met François-René en garde contre les habitants de l'île : "Vous savez que les habitants vous considèrent comme un voyant... Je crois qu'ils ont peur de vos yeux". Les deux hommes cherchent à lire les signes dessinés par le marc de café dans la tasse de François-René. Nikos dit : "Drôle de forme. Cela semble converger au centre... comme une implosion ou une explosion".

Le film est désormais fondé sur la superposition des mondes différents que François-René explore. Le monde réel de l'île d'abord, que François-René découvre peu à peu. Il se promène dans Anticythère et son regard fait l'apprentissage de signes de mort qui semblent coïncider avec les présages du marc de café : une forêt calcinée dans laquelle les arbres morts tendent leurs fourches noires vers le ciel, une route caillouteuse dans un paysage aride ; des rochers en surplomb qui dessinent des animaux gigantesques; un cimetière dans lequel des cochons zigzaguent entre les tombes et où François-René s'endort.

L’œil qui oscille entre cécité (découverte des lapins aveugles de l'île) et voyance, semble désirer un centre : une grotte sous-marine où François-René, palmé et masqué, nage au milieu des poissons, comme s'il assouvissait un désir de régression. Durant toutes ces scènes où François-René explore l'île, il est épié par les habitants comme par un mauvais œil: de vieilles femmes, vêtues de noir et assises sur le seuil de leur maison, l'observent et se détournent de lui à son approche; des enfants, qui jouent avec des capsules de sodas sur le replas entourant le cimetière, guettent les moindres gestes de l'étranger. Cette atmosphère de suspicion, que François-René vit comme un sortilège, ne se dissipe que lorsque le jeune homme retrouve un billet de 1000 drachmes égaré par la caissière de l'unique magasin de l’île. Aussitôt à la méfiance et au maléfice succède la fête. Fête de l'île à laquelle François-René est convié et où des femmes et des hommes exécutent la danse des mouchoirs au son de petits violons acides. Surtout, au cours de cette fête, François-René rencontre un vieillard qui lui révèle le passé légendaire d'Anticythère, l'île avant Cythère, avant la beauté : "il y avait une fois, il y a deux mille trois cent années de cela, un roi qui avait un fils. Ce fils ne voulait pas devenir roi. Un jour il décida de voler le trésor des spartiates et de s'enfuir à Anticythère avec la femme qu'il aimait. Mais un jour des soldats spartiates les retrouvèrent. Le couple d'amoureux se cacha avec le trésor dans une des grottes. Après quelques jours d'infructueuses recherches, le roi décida de murer toutes les entrées des grottes. Et c'est ainsi que le trésor ne fut jamais découvert".

A ce moment précis, le film bascule. Désormais 'L'exploration du monde réel (promenade dans l'île) et l'exploration du monde légendaire sollicitent tour à tour François-René, qui décide d'écrire un roman à partir des légendes de l'île. Il y a surimpression des scènes où François-René part à la découverte de l'île et des scènes légendaires où l'on voit le spartiate voleur (Néoptolème) et son amante (Ismène) se réfugier à Anticvthère. Le réel et l'imaginaire peu à peu se confondent et convergent vers les histoires d'amour.

Il y a un jeu de contrepoint entre les histoires d'amour vécues par François-René ou les habitants de l'île, et les histoires d'amour issues du passé légendaire. Les couples réels et imaginaires deviennent les doubles les uns des autres : François-René et la cantatrice qu'il découvre, jambes écartées, sur la plage ; Marina et Aristidis, revenus à Anticythère où ils se sont aimés pour la première fois ; un couple et leur petite fille dont le bateau a accosté près de l'île ; Néoptolème et Ismène.

Mais peu à peu, conformément au présage du marc de café, les histoires d'amour s'obscurcissent et se renversent en histoires de mort. La mort semble gagner tant le monde réel que le monde légendaire. Le surgissement de la mort au sein du monde réel est suggéré par la mort de la petite fille du couple, victime d'une tempête en mer. Durant toute la tempête, François-René et Nikos tentent de sauver, en vain, le couple. L'enterrement de la petite fille est célébré dans la chapelle, où vit François-René. Les habitants de l'île sortent une à une les statues des Saints habillés de vêtements rehaussés de fils d'or. Les statues semblent suivre du regard le berceau de l'enfant, devenu cercueil, que l'on achemine vers le cimetière. La procession est rythmée par les lamentations stridentes des pleureuses. L'enfant est enterré à l'endroit exact du cimetière où s'était endormi François-René : comme si la mort de l'enfant était l'indice d'une mort spirituelle qui se fait en François-René.

Parallèlement, la mort s'introduit dans l’univers légendaire que François-René cherche à recréer dans son roman. François-René écrit dans la chapelle, où les statues des saints semblent veiller sur lui. Joie de Néoptolème, d'abord, qui déverse les monnaies d'or du trésor sur le sable, tandis qu'Ismène danse de plaisir en riant. Néoptolème et Ismène transportent le trésor dans cette même grotte sous-marine, où François-René aime à nager. De retour sur le sol de l'île, Ismène, heureuse, marche au sommet d'une colline. Mais soudain elle regarde vers le bas, terrifiée. Au loin, plusieurs dizaines d'hommes en armes gravissent les rochers. Ismène entre dans une grotte, rejoint Néoptolème et crie : "Les soldats... Ton père... Ils sont là". On entend la voix du roi, le père de Néoptolème : " Avant de partir, murez-moi toutes les entrées et que cette île soit le tombeau de ces voleurs impies."

La mort de la petite fille du couple et la mort des amants légendaires coïncident avec la mort de la cantatrice qui, nue sur une plage, éveille le désir de François-René. La cantatrice incarne le chant que François-René a en lui, mais qu'il n'est pas encore capable de libérer. Le jeune homme marche sur les rochers qui entourent la plage de l'île. Il écoute la cantatrice chanter l'air de Brünnehilde, quand Siegfried la réveil1e, sur le rocher où la Walkyrie est devenue mortelle. François-René, amoureux, couche la femme sur le sable et lui fait l'amour. Mais l'inconnue continue de chanter, comme si François-René n'existait pas. Celui-ci essaye de parler, mais aucun son ne sort de sa bouche. Son amour se transforme alors en haine à l'égard de la jeune femme qui, sous son corps, chante si belle. Il s'empare d'un galet et assène plusieurs coups sur le visage de l'inconnue. Le sang gicle. François-René prend le corps de la cantatrice morte et le porte, en nageant, jusque dans la grotte sous-marine où les amants légendaires reposent. C'est là qu'il fait couler lentement, avec le poids d'un gros caillou le corps de la femme. Ici, le réel et l'imaginaire se fondent. Le corps de la cantatrice rejoint sous l'eau deux squelettes enlacés (Néoptolème et Ismène). Autour d'eux : une vaisselle d'or et des monnaies antiques.

François-René sort de l'eau. Il se met à siffler la mélodie qu'il jouait sur la guitare, dans le rêve qu'il avait fait lorsqu'il dormait sur le bateau en partance pour Anticythère. Le film s'inscrit ainsi dans une structure circulaire : la dissemblance entre la guitare et la cantatrice s'efface. Le rôle de François-René, et le meurtre de la cantatrice révèlent le même désir : celui de la mise au monde du chant, que l'écrivain sent en lui et qu'il doit transformer en œuvre. Le meurtre de la cantatrice (à vocation cathartique) permet la transmutation des forces latentes de François-René en acte créateur.

Mais alors que François-René trouve la voie vers la délivrance du chant qu'il porte en lui, tout bascule une fois encore. Tout s'éclaire. La cantatrice n'est pas morte tout à fait. Elle reprend vie, au moment où son corps touche les fonds marins et remonte peu à peu à la surface. C'est elle qui offre le trésor à François-René : trésor des amants de la légende, métaphore du chant retrouvé !

 

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Révision : 13 avril 2003