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Revue_Alsacienne_de_Littéra.jpg (39189 octets)

Ce texte est issu d'un entretien vidéo filmé par Laury Granier. Cet entretien avec Jean Rouch s'est déroulé le 29 décembre 1998 à la Galerie Donguy, à Paris, à l'occasion de l'exposition intitulée Miniatures, peintures, infographies et ardoises peintes moi en toi(t) du cinéaste Laury Granier (exposant sous le nom de Laury Aime). Cette exposition a eu lieu du 8 décembre 98 au 9 janvier 99 et a accompagné la sortie du film de Laury Granier La momie à mi-mots en exclusivité au cinéma Le Denfert à Paris. Ce film qui a obtenu le premier prix Andreï Tarkovski pour la création artistique et le langage cinématographique est encore d'actualité car il est toujours visible au Forum des Images de Paris. Il est sorti à Strasbourg au cinéma Odyssée en novembre 98 pendant qu’une exposition des peintures de Laury Aime se tenait à la galerie Aktuaryus, rue de la Nuée Bleue et dans les salons du cinéma l’Odyssée. C'est Carolyn Carlson qui tient le premier rôle dans ce film entièrement musical et dansé, sans aucun dialogue, où Jean Rouch, Philippe Léotard, Michèle Finck et le réalisateur jouent également. Ce sont les miniatures peintes qui sont le point de jonction entre l'exposition et le film. Elles ouvrent chacun des chapitres du film et sont la clé de voûte de l'exposition. Avec le film, l'exposition a constitué une sorte de diptyque qui révèle la vision totale de l'image proposée par Laury Granier (image cinématographique, image infographique, image peinte). Un autre point central de liaison entre le film et la peinture est la miniature Autoportrait en femme: la momie. Laury Aime a fait subir à cette miniature des métamorphoses infographiques. Lorsque l'entretien commence, Jean Rouch regarde les 56 variations infographiques disposées en bandes, accrochées au mur et qui passent animées par Director sur un ordinateur.

 

 

De la miniature peinte aux métamorphoses infographiques :

Laury Aime vers un pont entre peinture et cinéma

entretien avec Jean Rouch.

 

Laury Aime est peintre et cinéaste (sous le nom de Laury Granier). Ecrit en collaboration avec Michèle Finck, son film majeur, La momie à mi-mots (35 mm couleur) a obtenu le premier prix Andreï Tarkovski pour la création artistique et le langage cinématographique (1996). Présenté par Jean Rouch en avant-première à la Cinémathèque française, ce film a été selectionné dans différents festivals internationaux (en particulier Pesaro, Rome-Villa Médicis, Split, Istanboul, Manchester, Montréal, Wilemshaven, Paris-Unesco) et est sorti en salle en France et à l’étranger. Ce film repose sur l’alliance de la fiction, du conte et de la poésie et se place sous le signe de la danse (Carolyn Carlson, premier rôle), de la peinture (plusieurs œuvres picturales de Laury Aime sont intégrées), de la musique et du vidéo-art. Parallèlement à la sortie de ce film à Paris, Laury Aime a fait une exposition de peinture à la Galerie Donguy (du 8 décembre 1998 au 9 janvier 99). Le film est sorti aussi à Strasbourg au cinéma Odyssée en novembre 98 pendant qu’une exposition des peintures de Laury Aime se tenait à la galerie Aktuaryus et dans les salons du cinéma Odyssée. Avec le film, l’exposition (intitulée Miniatures, peintures infographiques et ardoises peintes : Moi en toi(t)) a constitué une sorte de diptyque qui révèle la vision totale de l’image proposée par Laury Granier (image cinématographique, image infographique, image peinte). C’est sous le signe de ce diptyque que se place l’entretien de Laury Aime avec Jean Rouch, issu d’un entretien vidéo filmé et daté du 29 décembre 1998 à la Galerie Donguy.

 

Laury Aime : Le point central de liaison entre le film et l’exposition, c’est la miniature Autoportrait en femme : la momie. J’ai fait subir à cette miniature, peinte à la main, des métamorphoses infographiques. Il y en a 56 disposées en bandes que tu peux voir accrochées au mur et qui passent aussi sur cet ordinateur, animées par le logiciel Director. Ce que je propose c’est un jeu de thème (la miniature peinte) et de variations (les 56 variations infographiques).

Jean Rouch : Ce que je vois, dans ce travail de peintre et d'infographiste, c'est le mouvement!

L. A.: Est-ce que tu arrives à voir la déformation infographique, là-haut? Le visage commence à se déformer jusqu'à devenir un vortex dans la quatrième infographie.

J. R. : Oui, j'aime beaucoup. Peut-être le véritable visage est-il entre les images?

L. A. : Et là, regarde, j'ai incrusté, par un autre travail infographique, la photo du visage de Carolyn Carlson, pour terminer la série. C'est la fin du travail, l'aboutissement. Et c'est le début d'un nouveau travail. Tu peux découvrir, ici l'autoportrait original présenté dans cette vitrine. (L. A. désigne le détail du portrait sur la miniature). Le visage est là, les cheveux sont là, avec des fleurs dedans, et les seins sont ici. C'est ce que j'appelle mon autoportrait en femme ou la momie.

J. R. : Quand l’as-tu fait?

L. A. : J'ai mis neuf mois pour faire l'ensemble de la miniature que j'ai commencé à l'hôpital et que j'ai terminé plusieurs mois après. Depuis, ce visage m'obsède : par l’infographie, je veux incruster sur ce visage ton visage, ou celui de mon père et de ma mère, ou ceux de mes amis, je ferai ainsi toute une exposition.

J. R. : Oui! et ce n'est pas seulement une exposition qu'il faut faire, c'est un film!

L. A. : Pourquoi pas! L'idée (que l’infographie permet de réaliser) est qu'un autoportrait peut être fait de tous les visages du monde!

J. R. : Oui, mais ça, attention, c'est Dieu!

L. A. : Et oui!

J. R. : Mais tu es fichu là! (Rires) Tu vas devenir carmélitain! (Revenant à la miniature) Tu l'as faite il y a combien de temps? Est-ce que tu l'as faite après le tournage de La momie à mi-mots?

L. A. : Je crois que c'était pendant.

J. R. : C'est le moment où tu as commencé à miniaturiser avec un pinceau à quelques poils?

L. A. : Non, c'est plutôt la fin de cette période…(Montrant une autre miniature) Voici la première miniature à l'aquarelle, avec les anges et leurs visages déformés et leurs ailes, là tu vois..

J. R. : Ah! mais ça! une seconde, tu vois, je trouve que c’est formidable, c'est très extraordinaire. (Jean Rouch observe cette miniature un long moment) Et là, est-ce que tu l'as déchiré de rage, un jour?

L. A. Oui, exactement, j'ai terminé par la déchirure ! Que j'ai d'ailleurs considérée comme l'aboutissement de l'œuvre d'art. Puis, je l'ai aussitôt après jetée à la poubelle. J’ai jeté cette miniature sur laquelle j'avais passé six mois de travail, le plus précisément possible! Au moment où je l'ai fait, j'ai trouvé que cet acte de folie était véritablement fort, c'était un peu comme une performance très privée: faire table rase de l'immortalité de l'œuvre d'art ! C'est seulement deux ans après que, par hasard, j'ai découvert cette miniature dans une armoire, chez mon père: il l'avait récupérée.

J. R. : Tu as un père admirable !

L. A. : Il l'avait récupérée dans la boîte aux ordures et il l'avait réparée.

J. R. : Là, alors là, on entre dans un truc très intéressant. Je trouve ça formidable et tu peux remercier ton père de ma part. Et ça vaudrait le coup d'en faire un film…

L. A. : Tu peux voir cette même miniature agrandie au 2ème étage de l’exposition. (Désignant deux autres miniatures) Est-ce que tu vois ici ce que je te désigne avec mon doigt?

J. R. : Oui il y a un poisson… un crapaud…

L. A. : Ce crapaud avec des cheveux, je crois plutôt que c'est un fœtus. Dans mon travail, parfois l’infographie peut prendre le relais de la miniature à la main. Par exemple, sur cette autre miniature qui est en fait un tirage infographique, si j'ai pu continuer la première miniature, en peignant cet espèce de fœtus, pixel par pixel, c’est grâce à l'ordinateur et à un logiciel qui s'appelle Painter. En fait, sur la miniature à l'aquarelle, je n'arrivais plus à peindre: j'étais arrivé au maximum de moi-même. Pourtant je voulais continuer à travailler et à enluminer cette image de points d'or et d'argent. J'ai donc scanné ma miniature avec une grande définition, puis je l'ai travaillée pixel par pixel en l'agrandissant 1600 fois. Je ne l'ai d'ailleurs pas encore terminée. J’espère un jour l'achever.

J. R. : Il faudrait l'agrandir sur une surface d'au moins un mètre sur quatre.

L. A. : C’est fait. Tu la verras à l’étage en seulement quatre ou cinq fois plus grand.

J. R. : (Jean Rouch désigne à nouveau les 56 infographies). Ici, le jeu auquel tu joues est un jeu singulier. Ce sont des yeux morts, sauf sur celle-là, est-ce que tu comprends ce que je veux dire?

L. A. Non.

J. R. : Je veux dire que là sur celle-ci, tu es regardé, et là, les autres, ce sont des foetus dans des bouteilles. C'est le visage d'un cadavre.

L. A. : Oui d'une momie!.

J. R. : Si tu veux, moi ça me rappelle ces églises de Naples ou de Rome avec les rangées de crânes des moines.

L. A. : Oui, je vois très bien ce que tu veux dire. L'église des Capucins à Rome!

J. R. : Exactement. Oui! Ici (désignant le mur avec les rangées d'infographie) c'est l'église des capucins, c'est à dire la mort ! Et ça (désignant la miniature avec les anges et les baigneurs) c'est Dansons la Capucine, c'est à dire l'enfance et le bonheur! C'est beau ce Dansons la capucine avec là, un jeune éphèbe qui va se déshabiller pour prendre son bain.

L. A. : Exactement!

J. R. : Dansons la capucine, il dit ça à sa belle. Et là, il y a des bateaux. C'est très intéressant!

L. A. : Dans une étape ultérieure, j'ai essayé d'animer cette série d'autoportraits sur l'ordinateur qui est là. (Jean Rouch et Laury Aime se dirigent alors vers l'ordinateur au milieu de la galerie). Regarde, je peux faire varier la vitesse de cette animation.

J. R. : Vas-y avec ton ordinateur. On va l'accélérer .

L. A. : Les images qui sont montrées sur le mur, là bas, sont animées ici et passent une à une à une cadence relativement faible. C'est une tentative d'animation faite sur cd-rom avec l'aide de l'informatique. Cette animation offre une nouvelle métamorphose de ce visage et c'est ce qui m'intéresse. La miniature pourrait se transformer infiniment et pourrait comporter aussi presque tous les visages de la terre.

J. R. : C'est très passionnant de montrer ça! Mais seulement quel est le discours que l'on peut tenir là-dessus?

L. A. : C'est un travail inachevé sur une métamorphose d'images à partir d'une miniature et grâce à l’infographie. Ce qui me plairait, c'est de faire passer chacune des images sans à coup, je souhaiterais un fondu fluide entre chacune des images. Je voudrais que l'on ait l'impression que ces images proviennent magiquement d'elles-mêmes, qu'elles s'autogénèrent en quelque sorte.

J. R. : Cela s'appelle un dessin animé.

L. A. : Oui. C'est le principe d'un dessin animé appliqué à la peinture. Regarde, l'idée a germé ici (Laury se dirige vers une rangée d’infographies accrochées sur un autre mur de la galerie) quand j'ai fait le travail sur cette photo que j'ai trouvée en exemple dans le logiciel Photoshop. J'ai commencé à transformer cette photo qui par son sujet est un clin d'œil à Cézanne. Au départ, c'est une nature morte. Je l'ai transformée presque infiniment. Et au bout de 165 variations, j'ai arrêté. Ce qui est complètement merveilleux pour moi, c'est que chacune de ces images, pourtant très différentes les unes des autres, provient de la même image au départ.

J. R. : Celle-ci réapparaît de temps en temps.

L. A. : C'est comme s'il s'agissait de clones avec d'infinies petites différences, mais qui procèdent de la même souche! L'idée de la présentation est ici fondamentalement cinétique. Il s'agit de faire comme un gigantesque story board, pour un film à venir, sur la métamorphose de l'image de départ. C'est l'ordinateur qui fabrique ces images, moi j'interviens pour trouver l'image juste. C'est comme si je voyageais dans l'imaginaire et que j'arrêtais le temps sur une image plus intéressante que les autres. J'aimerais aussi animer tout cela pour que l'on assiste à une métamorphose animée et en continu. (Désignant l'une des images infographiques). Avec, comme ici, des moments volcaniques.

J. R. : Et ici, d'où ça vient ce tournoiement, tu as fais tourner l'image?

L. A. : Oui, j'ai fait tourner l'image. Ce qui est merveilleux c'est qu'avec l'ordinateur on dialogue avec d'autres artistes: ici, avec Seurat et le pointillisme.

J. R. : Non, ça dialogue avec toi!

L. A. : Oui, dans la mesure où je suis Seurat! (Désignant une autre infographie). Là, c'est étonnant. Quand j'ai découvert cette série d'images, quand elles sont apparues : c'était comme si l'image elle-même voulait partir dans un voyage cosmique et s'éloignait. Pyramidal! Et celle-ci c'est la dernière.

J. R. : Tu termines sur des carreaux de la salle de bain.

L. A. : C'est tout à fait ça. Aussi simple que cela. (Désignant un autre mur) Là! c'est un autre travail : ce sont les ardoises du palais du Luxembourg du Sénat et c'est peintures en toi(t) avec un jeu de mots. Il y a des variations, des époques différentes. Ce sont des talismans, je les ai faites contre les maladies, contre la méchanceté.

J. R.: Le résultat c'est une épidémie de monstres, de ça (désignant une ardoise).

L. A. : Absolument! Je vois que tu sais lire. (Se dirigeant vers un autre mur) Voici la dernière étape du processus de métamorphoses. C'est à partir de ce tableau-partition que j'ai fait pour un piano que j’ai entièrement peint. J’appelle ces toiles peintes à l'acrylique des tableaux-partitions car elles sont destinées à être interprétées et à faire l'objet de compositions par des musiciens, surtout par des pianistes. J'ai voulu savoir ce que pouvait engendrer un tableau comme celui-ci et ça a donné ces 36 variations infographiques. Bien sûr, j'aurais pu ici aussi continuer infiniment. Toutes ces métamorphoses proviennent de ce seul tableau.

J. R. (se rapprochant des 36 infographies issues du tableau-partition) : Là, alors, on rentre dans une super abstraction.

L.A.: Mais là aussi ça dialogue avec d'autres artistes. Celle-ci m'a fait penser à Paul Klee.

J. R. : C'est une citation anonyme.

L. A. : (riant) c'est une autocitation anonyme!

J. R. : Une citation de faussaire. C'est très passionnant. (Désignant les tableaux-partitions). Ce sont des tableaux réels que tu as fait…

L. A. : …à la sueur de l'alchimique caboche! Ce sont des compositions picturales qui ont demandé beaucoup de temps et d'efforts et qu'il faut prendre le temps de contempler. Il y a de grandes charges sur chacune d'elles. Elles varient beaucoup en fonction de la distance qui change tout .

J. R. (Désignant l'un des tableaux): Là, il y a l'apparition de quelques fantômes habituels.

L. A. : Chacun de ces tableaux-partitions peut donner lieu à 36 variations infographiques ou plus, que je pourrais aussi animer, avec un ordinateur, pour raconter la métamorphose d'un tableau!

J. R. : Ca devient colossal et magique ton œuvre!

L. A.: Oui: une œuvre qui s'engendre infiniment. (Laury Aime montre un autre mur). Ici ce sont 60 dessins au stylo bic ou au feutre noir toujours à la frontière entre l'abstraction et la figuration. Une synthèse des deux : c’est cela que je cherche à faire.

J.R. : Ca me fait penser à La Coquille et le clergyman qui sont des essais de ce genre, une abstraction onirique séduisante. Quand j'ai vu ce film dont le scénario est d’Antonin Artaud, j'ai pensé d’abord que c'était à l'opposé complet de fabricants de grands rêves comme Salvator Dali et Giorgio de Chirico qui, eux, faisaient de la peinture métaphysique entre guillemets, enfin, tu vois! C'est à dire qu'ils inventaient le moment d'une histoire qui était représentée le plus précisément possible : ce n'était pas de l'impressionnisme, c'était du classicisme total, c'était de la grande peinture pour entraîner le voyeur dans un voyage. Le voyeur devenait un voyageur dans un pays imaginaire où je me retrouvais où je retrouvais des rêves que je faisais. Et en face de ça , l'arrivée de l'abstraction me semblait un prétexte à une invention aléatoire de l'imaginaire. C'est la fameuse histoire d'un pinceau attaché à la queue d'un âne à qui l'on donne de l'avoine et qui remue la queue et qui faisait une peinture. Je ne sais pas si cette histoire est vraie, je ne sais pas où je l'ai lue, mais c'est une superbe histoire. Je t'indique un truc, en particulier chez Man Ray : l'utilisation de la solarisation qui était due au fait que, pendant le développement d'un tirage, tu l'exposais à la lumière, un bref instant, et les contours devenaient le dessin avec des dégradés gris.

L. A. : Dans la série des photos transformées, j'ai utilisé cet effet de solarisation.

J. R. : Ce que tu as fait, c'est une recherche très passionnante et très complexe, un peu trop complexe pour moi peut-être, et qui remet en question la peinture! Et on attend maintenant de voir le film La momie à mi-mots, après avoir vu cette exposition.

L.A.: Oui, mais il y a encore la petite animation sur cd rom.

J. R. : Ca, c'est passionnant. Je me demande si çela ne serait pas l'occasion de faire ici, chez Donguy, une galerie style "Gradiva", c'est à dire la galerie qu'avait fait Breton, rue de Seine. Il faudrait trouver le moyen…

Jean Rouch se lève alors et se dirige vers le livre d'or de Laury Aime pour écrire: "En mai 1937, André Breton inaugurait, rue de Seine, la galerie 'Gradiva' pour laquelle Marcel Duchamp avait découpé la silhouette d'un couple… Je n'avais pu y être (passant au même moment l'écrit du concours de l'Ecole des Ponts et Chaussées) mais je me précipitais rue de Seine le lendemain. Je m'attendais à y rencontrer Isadora Duncan ou son frère qui avait son atelier helléniste en face, mais ils étaient venus la veille… Aujourd'hui, Laury ouvre pour moi sa boutique à rêves électroniques, que La momie nous avait déjà conté à mi-mots autour du petit Luxembourg. Alors le rêve, une fois de plus, de pouvoir entrer sans prévenir dans le laboratoire alchimique d'un Nicolas Flamel qui ne fabrique pas de l'or mais de la poésie …Vite, vite, Laury une image filmée de cette exposition que l'on projetterait un samedi matin, à la cinémathèque! A bientôt. Jean Rouch. Paris le 29 décembre 1998".

J. R. : Tu vois, c'est ce que je pense, c'est le cadeau que tu peux me faire, c'est de nous faire partager ce qu'on a vu sur ton ordinateur. Sur le grand écran de la cinémathèque française. Ton exposition peut être mise n'importe où! On pourrait envisager d'en mettre un bout dans l'entrée de la cinémathèque, en bas.

L. A. : Par exemple, toutes les infographies et la miniature. Ce qui m'intéresse, c'est de créer un pont entre la peinture et le cinéma. La projection picturale, c'est presque la même chose que le cinéma. La toile, c'est un écran.

J. R. : Tu arrives à un jeu singulier qu'il faut mettre en marche. Le cinéma a été inventé comme ça. On ne savait pas ce qui allait ce passer. Il faut filmer l'expo et la montrer sur grand écran. (S'interrompant) Allez! tu me ramènes! (Jean Rouch se lève). Cette exposition c'est un truc très passionnant. C'est l'invention!