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" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique. 

Genèse d’un film.

 

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III. 2. d. La séquence du peintre, de la Renommée (Pégase) et des cerfs-volants (Champ de Mars)

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Nous avions rendez-vous très tôt au Champ de Mars, où devait se tourner une scène importante, où je jouais moi-même le rôle du peintre. Je craignais un peu de ne pouvoir assumer, ce jour-là, tous les rôles: producteur-réalisateur d’un tournage difficile, acteur dans une scène qu’il me faudrait moi-même diriger costumé. Je savais que je serai pris entre le mégaphone du metteur en scène, le chevalet du peintre, et le cheval déguisé, avec de larges ailes en plumes d’autruche blanche: Pégase. Par delà ma crainte, j’étais excité par l’idée de la surimpression surréaliste qui allait naître à la faveur de mon tournage: "la rencontre" non "entre un parapluie et une machine à coudre" (selon la proposition de Lautréamont reprise par Breton), mais entre la tour Eiffel et un cheval blanc, ailé, monté par la Renommée.

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Le directeur du centre équestre de Chantilly nous attendait depuis longtemps, lorsque nous arrivâmes au petit matin au Champ de Mars. 

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Il avait pris soin de partir très tôt de Chantilly et pensait que la scène se tournerait tout de suite. C’était compter sans les nombreux préparatifs indispensables à la bonne marche de la séquence. Il croyait que l’ensemble des scènes concernant Pégase se tournerait en une matinée. Je dus m’ingénier à lui faire comprendre qu’il devrait également rester toute l’après-midi, qui devait être consacrée à la découverte de deux grands cerfs-volants, aux côtés de Pégase.

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 Je lui expliquais qu’un tournage impliquait beaucoup de patience et que quelques secondes de pellicule tournées exigeaient des heures de préparation.

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L’enjeu de la première séquence était le suivant: le peintre (moi-même) peignait une carte du monde, qui allait servir de modèle à la décoration de l’un des cerfs-volants. Surgissaient Pégase et la Renommée, qui avaient surtout pour moi une valeur onirique. 

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Avec connivence, ils jetaient un regard plein de bienveillance et d’humour sur le travail du peintre. Ce qui m’enchantait, c’était la correspondance entre le triangle du chevalet et l’effilé triangle de la tour Eiffel (qui allait dans le sens de la forme triangle dominante dans le film: voire par exemple la harpe Baschet jouée par Margret). Je rappelle que cette scène était la première du film, où la tour Eiffel apparaîtrait dans le bon sens (dans l’une des scènes de dépression de Carolyn, la tour Eiffel apparaissait en reflet dans l’eau, la pointe dirigée vers le bas). Cette vision de la tour Eiffel, dans le bon sens, soulignée par le redoublement de la forme triangulaire dans le chevalet, était l’un des indices, que nous étions au point charnière du film: au moment où les forces de mort allaient peu à peu se convertir en forces d’élévation, que viendrait encore confirmer la scène des cerfs-volants, dans l’après-midi.

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Pour éviter la difficulté liée à ma double fonction d’acteur et de metteur en scène, j’avais pris soin de découper méticuleusement cette séquence. La caméra était placée au niveau du sol, derrière le dos du peintre (je me rendis compte, bien plus tard, au moment du montage, que j’avais retrouvé, en filmant de dos le peintre à son chevalet, le cadrage du tableau de Vermeer, L’atelier du peintre).

La rencontre entre le peintre et la Renommée était, elle aussi, découpée. Il s’agissait, principalement de plans subjectifs (point de vue du peintre, et point de vue de la Renommée) restitués par une caméra épaule que j’ai voulu tenir moi-même, sortant du rôle d’acteur pour assumer celui de caméraman, et vis-versa.

J’ai pris un soin particulier à filmer Pégase sur le Champ de Mars. Monsieur Bienaimé, le directeur de Chantilly,

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m’a montré toutes les variétés de pas dont était capable Suegno (véritable nom du cheval déguisé en Pégase). De tous les pas que l’écuyère (Sophie Bienaimé, déguisée en Renommée) faisait faire à Suegno, je préférais, ici, le plus difficile: le trot Royal en levée, très majestueux. C’est ainsi que je choisis ce pas, pour toutes les apparitions de la Renommée et de Pégase.

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L’après-midi, les difficultés s’accrurent: autour de Pégase et de la Renommée venaient à la fois les trois anges jogger, l’un des mages (Jean Rouch), les trois enfants de la séquence des cartes (qui devait être tournée le lendemain) et les deux cerfs-volants géants (de deux mètres sur quatre chacun).

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Je garde un souvenir extraordinaire de cet après-midi, lorsque des centaines de spectateurs, surtout des enfants des environs du Champ de Mars, se sont regroupés autour du plateau. Les enfants étaient fascinés par Pégase, aux grandes ailes blanches, qui semblait prendre son envol dès qu’il trottait dans les allées. 

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J’entendais des enfants qui disaient à leurs parents: "ça existe vraiment les chevaux avec des ailes?"... "Est-ce qu’il va s’envoler?" Et les enfants autour de l’esplanade guettaient, des heures durant, l’envol du cheval magique. Certains obligeaient leur parents à rester et ne voulaient pas rentrer à la maison, tant ils étaient sûr que la Renommée finirait par s’envoler.

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J’étais heureux d’être, pour une après-midi, l’enchanteur du Champ de Mars et j’espérais que quelque chose de cet enchantement parviendrait aux spectateurs de La momie à mi-mots. Pour moi, la fonction du cinéma, dans notre monde souvent désenchanté, est aussi d’enchanter: que le miracle se produise au moins une fois, sous les traits d’un cheval ailé trottant sous la tour Eiffel !

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Mais cette présence des enfants, tout en me stimulant, était aussi cause de difficultés accrues. Les enfants impatients risquaient sans cesse d’entrer dans le champ et les assistants, pour lesquels j’avais prévu d’autres tâches, étaient tout occupés à les refouler. L’excitation des enfants atteignit son comble au moment de l’arrivée des cerfs-volants. Nous essayâmes avec Pierre Fabre (le concepteur de la structure des cerfs-volants) de les faire voler.

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Malheureusement le vent n’était pas au rendez-vous ce jour-là. 

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Les cerfs-volants refusaient de décoller, malgré toutes nos tentatives. Ce devrait être partie remise. Hélas, on verra plus tard que la partie sera remise souvent: en effet, induit en erreur par la météo qui prévoyait du vent, j’ai plusieurs fois organisé des tournages qui ont tourné court, par arrêt subit des vents.

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Révision : 11 avril 2003