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" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique. 

Genèse d’un film.

 

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VI. 3. d. L’art e(s)t l’autre

J’ai aussi acquis pendant le tournage de ce film un certain esprit de groupe: aimer vivre et partager avec les mêmes personnes, pendant plusieurs jours, la même expérience, c’est aussi créer des contacts chaleureux avec chacun des membres de l’équipe.

Il faut aussi créer une bonne entente entre tous, et surtout l’envie de travailler ensemble, d’être tous les serviteurs d’une idée enthousiasmante.

Mon travail solitaire de peintre est diamétralement opposé à l’esprit de groupe. C’est pourquoi, je suis heureux de l’expérience, qu’il m’a été donné de faire, parce qu’elle m’a permis de comprendre que je pouvais me sentir aussi heureux en dirigeant une aventure collective.

Une autre vertu engendrée par la réalisation de ce film, c’est une prise de conscience accrue des choses qui m’entourent. J’ai appris à mieux respecter le travail d’autrui, donc à respecter l’homme, capable de tant de réalisations, dans des domaines très différents. Lorsque je regarde, aujourd’hui, un film ou un objet, quels qu’ils soient, je pense tout de suite qu’il y a des hommes qui les ont conçus, et se sont battus, souvent durement, pour qu’ils existent. J’ai acquis, au fil de ces années, un très grand respect pour le moindre des bienfaits qu’offre notre société. Je suis aussi devenu curieux de tout.

Quand je me promène dans la rue, je regarde tout ce qui m’entoure, d’une façon bien différente d’autrefois. J’éprouve aussi souvent le désir d’apprendre comment les choses qui m’entourent ont été réalisées. Du trottoir, aux mille étoiles de petits cailloux logés dans la pâte du goudron, que j’emprunte, à la petite cheminée en argile cuite rouge, au sommet d’un toit parisien, où se pose le vol d’un pigeon, tout ceci est le produit de la connaissance et du travail des siècles. Je vois dans le grand et si beau décor que représente Paris les efforts qui ont été fournis par des générations d’hommes qui ont cherché à bien faire et à parfaire continuellement une oeuvre de chirurgien diamantaire. Ils ont laissé de splendides traces, qu’il nous faut conserver et embellir, à notre tour. Aussi, je me sens aujourd’hui un peu plus leur frère, moi qui ai tenté modestement, de mon côté, de rassembler quelques énergies, pour raconter une histoire, aussi bien que je l’ai pu.

Dans mon rapport avec autrui, j’ai aussi changé: lorsque je rencontre quelqu’un, je me dis maintenant que je lui dois peut-être quelque chose que j’ignore et que je dois peut-être à sa famille, à ses ancêtres, une somme de bienfaits considérables 169.

Je profite donc mieux de la vie car je me suis, petit à petit, ouvert à elle, comme la chrysalide de Carolyn-momie, devenue papillon, à la fin du film.

Je ne vois donc plus la vie de la même façon. Je ne sais si ce sont les obstacles et les difficultés que j’ai dû surmonter pour réaliser La momie à mi-mots qui me rendent si différent et compatissant. En tout cas, cela me rend reconnaissant envers tous ceux qui m’entourent et qui cherchent, dans la mesure de leurs moyens, à faire quotidiennement de leurs mieux.

Ce film a ainsi servi de prétexte à des rencontres. Je devais forcément m’ouvrir aux autres un jour, apprendre à les aimer et à découvrir en chacune des personnes, qui m’entouraient de leurs talents.

Réaliser un film, c’est aussi le plus souvent, tisser un réseau de relations amicales et chaleureuse pour l’avenir. Faire un film, c’est aussi faire l’apprentissage de l’amour. J’ai, grâce à ce film, expérimenté aussi ce qu’est la fraternité entre les hommes et j’ai éprouvé ce que peut être le sentiment de confiance, dans la compétence des autres. Ce qui fut le plus réjouissant, c’est de les regrouper et de travailler avec toutes ces compétences différentes, pour réaliser un projet commun. Sans l’aide de tous, en commençant par ma famille et mes amis, il aurait été impossible de le mener à bien.

Ce film tire aussi son originalité du fait qu’il doit davantage son existence, aux nombreuses énergies, et aux compétences amicales et bénévoles, dans des domaines très divers qui ont aidé à l’édifier, qu’à de l’argent. C’est aussi parce que le message de ce film est un message d’espoir que de nombreuses personnes ont accepté de m’aider à le réaliser. Je crois que nous sommes heureusement nombreux à croire que les lendemains seront meilleurs, et qu’ils chanteront peut-être, même si l’on doit passer par des moments pénibles, comme le personnage qu’incarne Carolyn Carlson, dans La momie à mi-mots.

Ce film m’a fait prendre conscience d’une chose: tous les hommes de bonne volonté sont au service d’une idée magnifique: réaliser Walhalla 170, le son juste, le paradis pour tous. Ce film veut être un message de paix et d’amour, dans un monde, qui souvent peut paraître à certains hostile.

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169 Kalou Rinpoché, La voie du Bouddha, selon la tradition tibétaine, inédit Sagesses, édition du Seuil, juin 1993, p. 279: "Nous ne pensons pas assez que nous dépendons les uns des autres: sur un simple plan matériel, nous sommes tous interdépendants pour nos besoins quotidiens, et c’est ainsi que nous avons une dette envers tous les êtres. En prenant profondément conscience de ce que tous les êtres aspirent au bonheur, mais souffrent de maintes façons, nous pouvons développer véritablement bodhicitta. Conscients du mal-être et de la souffrance omniprésents, notre amour et notre compassion grandiront, et nous nous efforcerons d’avancer aussi vite que possible vers l’état de bouddha pour obtenir les qualités qui permettent, au niveau essentiel, de soulager tous les êtres."

170 Walhalla est le titre du prochain film que je voudrais écrire et réaliser.

 



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Révision : 11 avril 2003