Accueil de "Diverses lettres envoyées"
Au
Président du fond Social Juif Unifié (FSJU)
Espace Rachi
39 rue Broca
75005 Paris
copie de cette lettre à
Monsieur Costa Gavras
Paris le samedi 16 mars 2002,
Monsieur,
Permettez-moi de vous écrire une lettre un peu longue mais nécessaire au sujet de récents événements survenus à l’Escurial au cours du débat, à la suite de la projection d’ Amen film magnifique de M. Costa Gavras.
Permettez-moi aussi de vous offrir ci-joint, par la même occasion, la copie de ce que j’ai pu vidéographier de ma place, ce soir là. J’espère que cela vous fera plaisir, même si je n’ai malheureusement pas pu enregistrer les propos de M. le Rabbin de Genève comme je l’espérais, car comme vous le savez, sans doute, j’ai été interrompu par le présentateur de la soirée. (Vous pourrez voir vous-même, à la fin de l’enregistrement, de quelle manière ce présentateur, sans respect pour ce que je faisais, m’a intimé l’ordre d’arrêter de filmer et cela en venant se placer devant ma caméra).
J’espère que, si cet enregistrement vous a fait plaisir ainsi qu’aux membres de votre association, vous aurez à cœur d’en faire une copie à M. Costa Gavras ainsi qu’aux autres acteurs de la soirée pour les remercier de leur présence. Ils seront, je pense, heureux de se découvrir à travers mon regard et peut-être fiers de réécouter les heureux propos que nous avons eu le plaisir d’entendre. Bien sûr, permettez-moi encore une fois de le répéter, je regrette de ne pas avoir pu archiver les propos de M. le rabbin de Genève.
Permettez-moi aussi de vous dire à quel point je suis attristé par ce qui s’est passé l’autre soir et par la réaction du public à mon égard. Je crois maintenant de mon devoir de vous donner quelques explications qui, j’espère, apaiseront le ressentiment que les uns et les autres ont pu, à juste titre ou pas (telle est je crois la question), ressentir à mon égard, à l’occasion de cette manifestation publique. Ma réponse est bien sûr qu’il s’agit d’une profonde injustice dont j’ai été victime.
Alors que j’étais arrivé en retard à cause de l’importante circulation (je venais de tourner une vidéo sur un ami poète, ancien ambassadeur), on m’a très aimablement trouvé une place, malgré mon retard, (et je remercie ceux qui ont réussi à me caser, ce soir là malgré l’important afflue du public). Ce n’est donc qu’à tâtons, dans le noir, que j’ai pu enfin m’asseoir à ma place et découvrir l’œuvre de M. Gavras que j’ai beaucoup appréciée. Comme je l’avais expliqué la veille à M. Alain Knafo, qui m’a heureusement trouvé un billet à la dernière minute, je souhaitais assister à cette projection, en présence du réalisateur du film, d’autant plus que c’est Madame Michèle Finck qui m’avait parlé de cette soirée et m’avait invité à m’y rendre: elle ne pouvait elle-même y assister. En effet comme vous le savez, sans doute, Madame Michèle Finck est professeur de littérature comparée à l’Université de Strasbourg, elle est aussi conférencière régulière du centre Rachi (notamment nous avons eu le plaisir de l’entendre à l’occasion de plusieurs présentations d’ouvrages du poète juif alsacien Claude Vigée – sur qui j’ai d’ailleurs réalisé une vidéo, à sa demande, pour le colloque de Cerisy-la-Salle qu’elle a organisé autour de l’œuvre de ce poète).
Donc, j’étais arrivé en retard (est-ce un crime ?) et je n’ai effectivement pas pu vous demander l’autorisation d’usage comme j’aurai dû le faire, si j’avais eu le temps, (mais vous avez compris que je m’étais décidé à la dernière minute). Bien sûr, si j’étais arrivé en avance, j’aurai demandé cette autorisation et je me serai présenté à vous avec grand plaisir. Je profite de l’occasion de cette lettre pour vous demander de bien vouloir m’excuser rétroactivement pour cela.
Bien sûr, vous pourrez me demander pourquoi je n’ai pas demandé l’autorisation au présentateur juste après la vision du très beau film de M. Cosa Gavras, et avant le débat où nous allions l’entendre ? Mais voilà, je n’ai pas osé demandé cette autorisation tant j’étais sous le choc de l’émotion du film. Ce n’était pas à mon avis le bon moment : je me promettais de vous prévenir après le débat ou du moins d’en parler au présentateur après. J’étais à peu près sûr de ne pas vous déplaire puisque j’avais enregistré en vidéo, très discrètement, une soirée de haute volée que j’espérais mémorable pour tous. Par le truchement de la vidéo, cette soirée serait donc éternellement visible et bien sûr, comme il est d’usage, je tenais son enregistrement à votre disposition pour que vous la partagiez à l’occasion avec vos amis sur un écran de télévision. En vous envoyant cette cassette je mets cette soirée à la disposition du centre Rachi, du moins le peu qu’il m’a été possible de conserver de cette soirée.
De toute façon, me disais-je aussi, je vidéographie à titre privé une manifestation publique et je le fais qui plus est très discrètement, de la place que l’on m’a assignée. Cette soirée est publique, personne n’a par conséquent rien à cacher à personne et, me disais-je aussi, les acteurs de cette soirée n’ont certainement pas honte de l’œuvre qu’ils viennent de nous présenter, ni des propos qu’ils vont exprimer. Il s’agit pour la plupart d’entre eux de personnes publiques qui savent se conduire en public comme je crois moi-même en pareille occasion.
C’est donc très confiant et la conscience très tranquille que j’ai donc commencé à enregistrer en toute innocence, la soirée en vidéo. Mais tout de suite, je distinguais la silhouette d’un jeune homme qui a même voulu m’interrompre en me disant quelque chose qui devait certainement à voir avec une autorisation. Pour ne pas gâcher ce que j’étais en train de faire, je lui ai fait comprendre que je m’étais bien sûr autorisé (je pensais honnêtement avoir très modestement l’autorité morale de le faire à ce moment-là) et comme il insistait de nouveau pour m’interrompre dans le noir, je lui ai dit que l’on verrait après.
Tout allait bien (et vous pourrez le constater sur la copie que je vous offre) jusqu’à l’interruption publique du présentateur du débat au moment où le rabbin allait développer sa pensée en réponse. Le ton de ce présentateur à mon égard m’accusait, à l’en croire, d’un forfait effroyable. Je dois vous dire que j’ai ressenti son ton de voix comme celui que je ne pourrai moi-même pas prendre, même envers mon pire ennemi, et cette façon si désobligeante de me parler m’a semblé hors de propos au moment où j’allais recueillir les paroles du rabbin. Cela m’a semblé tout a fait disproportionné et peu tolérant à mon égard; et si en réponse mes propos, que je regrette, ont dépassé ma pensée, c’est que je me suis senti injustement condamné et accusé. J’ai donc rétorqué un peu vivement.
Le ton de ce présentateur, condescendant et expéditif me faisait devant tout le monde une leçon sur la courtoisie, alors que la courtoisie l’aurait obligé de prendre le temps de m’écouter et d’essayer de comprendre la situation qui m’avait mené à prendre cette liberté, cette apparente audace de filmer sans avoir demandé l’autorisation au préalable. Au besoin, la courtoisie que ce présentateur a invoquée si discourtoisement à mon égard, aurait dû l’inciter à me permettre de me présenter, pour lui expliquer les raisons qui m’avaient motivé à prendre cette liberté de ma propre initiative. Or, le ton qu’il a pris contre moi avait été d’emblée celui des êtres injustes et méchants (et nous venions de les voir, hélas, une fois de plus dans certains des personnages du film de M. Costa Gavras). Je crois que vous aurez à cœur d’excuser cette association que j’ai faite mais je suis sûr que vous comprendrez la situation : le film que nous venions de voir quelques moments auparavant et dont il était encore question dans le débat en cours. Cette association que j’ai faite il faut comprendre qu’elle est le produit de mon esprit de synthèse, de mon imagination et de ma rapidité d’artiste : ce sont là quelques unes des qualités (et parfois des défauts !) de la profession que j’exerce.
Donc ce présentateur m’a soudain formulé une interdiction impérative de filmer alors qu’il ne savait rien de moi, ni de ce qui m’amenait à vidéographier. Comme dit plus haut, j’étais venu filmer en vidéo pour permettre à Mme Michèle Finck, absente ce soir là, de prendre connaissance de ce moment qu’elle aurait été intéressée sûrement de vivre en notre compagnie. De plus, si je filmais, c’est aussi pour moi-même, pour pouvoir mieux comprendre, le cas échéant, en me repassant les propos enregistrés, les dires qui concernent une histoire que je ne connais pas très bien et qui a malheureusement réservé son cortège d’Horreurs et de Cauchemars, (un héritage d’Atrocités et d’Horreurs) J’avais la chance d’entendre tout cela de la bouche d’éminents spécialistes de la question (madame la professeur de Paris VII) et de ceux qui avaient réalisé le film, le scénariste, le cinéaste ; mais aussi j’avais la chance de pouvoir mieux comprendre l’attitude de l’église par le prêtre présent et j’aurais eu la chance d’écouter le rabbin sur cette question si je n’avais pas été interrompu brutalement. Est-ce si grave que je souhaite pouvoir revoir tout cela calmement et me faire une idée? Après tout, il s’agissait là de me permettre au besoin, de me repasser la mémoire d’une soirée, par le truchement de la vidéo, et de revoir ainsi les images que mon œil a permis d’enregistrer sur une bande vidéo, plus sûre que ma mémoire : et cela d’une place qui est à moi et que j’ai bien sûr payée. Si je faisais cela, c’est aussi pour palier mon manque de mémoire, et vous savez que les outils contemporains nous permettent heureusement de palier ce manque de précision dans la mémoire.
Au besoin la cassette enregistrée aurait pu servir de témoignage et je la tenais, bien sûr, comme il est d’usage, à la disposition de tous. Je crois honnêtement que je n’étais pas en train de commettre une faute, ni une imposture, ni un quelconque outrage, ni un quelconque vol comme le ton de ce présentateur semblait le faire croire à tous. Non ! décidément, je n’ai pas honte de ce que j’ai fait hier soir. A l’heure des webcam, à l’heure où l’on vous filme à tous les coins de rues, dans le métro, pour votre sécurité, sans vous demander jamais aucune permission, à l’heure où vous pouvez, dans n’importe quel musée (public, comme le Louvre, par exemple) filmer autant que vous le souhaitez. A l’heure des téléphones avec vidéophonie - qui en ce moment-même, au Japon, et bientôt en France – permettent à n’importe qui de montrer et de faire entendre ce qu’il est en train de vivre dans le cadre du vidéophone de son interlocuteur que celui-ci découvre sur l’écran de sa montre (par exemple) et qui peut, lui aussi, à son tour, vous montrer, en tout petit, le spectacle, le débat auquel il assiste, si vous êtes trop loin pour être physiquement présent à ce débat. Vous comprendrez donc qu’à l’heure de la Communication, que je ne pensais vraiment pas avoir commis une quelconque imposture en ne demandant pas à l’avance une permission à ce présentateur, et j’en aurais parlé à la fin moi-même. Ce présentateur aurait dû attendre la fin du débat au lieu de m’interrompre comme il l’a fait.
De plus, permettez-moi d’ajouter qu’il me semble que cela est de mon devoir, pour les siècles à venir, d’archiver ce moment pour que de telles infamies (1939-1945) ne se reproduisent pas ! Ce présentateur, de toute évidence, ne l’a pas pensé. Il n’a pas pensé que celui qui avait pris la peine d’enregistrer ce débat en vidéo (acheter la caméra, la pellicule, nettoyer l’objectif etc… apprendre à se servir d’une caméra pendant plus de vingt ans – car c’est aussi mon métier) était peut-être là aussi pour apporter de son côté une petite pierre de plus à l’édifice que nous essayons de construire : pour que de telles injustices et atrocités (celles du nazisme) ne se reproduisent plus. Il s’agissait donc ici aussi, d’une certaine manière, de notre sécurité à venir à tous et à ce titre, j’estime à ce stade de ma réflexion que j’ai bien fait de ne pas demander l’autorisation à ce présentateur puisqu’il s’agit de sécurité et que l’on a encore le droit de filmer pour sa sécurité ou pour celle de la société.
Bien sûr, monsieur le président, je regrette, en ce qui vous concerne, de ne pas vous avoir prévenu à temps et de ne pas vous avoir au préalable demandé l’autorisation mais vous comprendrez que l’enjeu pour tous est trop important. Ce présentateur à mon avis ne respecte pas son public. S’est-il seulement interrogé sur son devoir de façon éthique ? Certes, il n’est malheureusement pas un rabbin et il a cru bon qu’il devait m’interdire de le filmer au moment ou le rabbin, déjà blessé (sa béquille), allait parler (n’est-ce pas le blesser une nouvelle fois que de m’avoir empêché de recueillir ces propos fondés comme vous le savez sur bien des sciences : la pensée, l’éthique, la philosophie, la mystique, etc?). Cette caméra, ce soir là, enregistrait la Lumière et cela pour le bien de tous à travers votre modeste serviteur.
Si on présente, avec intelligence, les êtres tels que ceux qui étaient là ce soir là, on devrait être véritablement heureux et reconnaissant que quelqu’un ait eu la bonne idée d’enregistrer la soirée. C’est pourquoi je n’ai vraiment pas compris cette attitude. Il vient immédiatement dans l’esprit d’un présentateur censé que cela va peut-être permettre aux absents, et aux êtres des temps à venir, de communiquer avec la source même de la connaissance. Mais cela bien sûr ce présentateur ne l’a pas compris ! Il a peut-être eu peur! Et si c’était le cas que voulait-il cacher au monde pour interrompre la communication que j’avais ouverte avec les temps à venir !
Sans doute m’aurait-il mieux accueilli et parlé avec plus de déférence, voire de délicatesse s’il avait était prévenu par vous. Ah ! s’il avait su que celui qui commettait apparemment l’outrage de lèse-majesté avait enseigné à Paris 1-Sorbonne l’art de faire des films et des vidéos à de nombreux étudiants et était, d’une certaine manière, un collègue de Monsieur Costa-Gavras (dont j’admire le grand talent), sans doute ce présentateur m’aurait-il incité, encouragé même à filmer, et peut-être aussi m’aurait-il présenté à l’assistance, s’il avait été prévenu de ma venue. Il aurait pu dire aussi que j’ai, entre autre, obtenu un doctorat en art et sciences de l’art (cinéma-télévision-audiovisuel) à la Sorbonne et que je suis le réalisateur et le producteur de La Momie à mi-mots, un film en 35 mm qui est sorti à Paris (pendant plus de 5 mois), en France, en Italie, aux Etats-Unis et que l’on peut voir dans tous les centre culturels français du monde (c’est malheureusement le dernier film de cinéma dans lequel Philippe Léotard a joué de son vivant au dire d’un article du Monde). C’est aussi le premier film de cinéma dans lequel Carolyn Carlson est le premier rôle. Jean Rouch, l’ancien président de la cinémathèque française et collègue de M. Costa Gavras pour cette importante charge, y joue également le rôle d’un mage. Sans doute encore, s’il avait été prévenu de ma venue, aurait-il peut-être annoncé ma présence, en provoquant peut-être des applaudissements, en me demandant d’intervenir dans le débat, au lieu d’exciter la haine de la foule à mon égard et en m’interdisant de parler et en m’interdisant de me défendre. Peut-être aussi aurait-il dit que ce soir là, celui qui tenait la petite caméra, dans le petit coin où on lui avait finalement trouvé une place avait obtenu le premier prix Andreï Tarkovski pour la création artistique et le langage cinématographique en 1996 pour son film, qu’il a présenté récemment dans le grand amphithéâtre du siège des Nations-Unis de New York devant les autorités onusiennes : par conséquent des hommes de tous les coins de la planète, hommes et femmes qui heureusement, vous le savez, comme moi, œuvrent à leur manière pour la paix dans le monde, une plus grande justice, comme Monsieur Costa Gavras essaye de son côté de le faire en ayant réalisé ce film et comme, modestement, votre serviteur essaie de le faire à son échelle. Sans doute, si ce présentateur avait eu la chance de savoir, (mais voilà le destin n’a pas voulu qu’il le sache), d’autres choses encore sur le petit monsieur (vous pouvez découvrir d’autres informations à mon sujet sur le site internet www.lorimage.com) qui avait eu l’audace de filmer, sans le prévenir, aurait-il tenu sa langue. Il n’aurait très certainement pas employé les propos malheureux et encouragé cette foule de spectateurs à être méchante envers moi (à l’exception d’une femme qui d’elle-même, je dois le reconnaître, est sortie indignée par ce qui s’était passé et que je salue ici, au passage). J’avais, aux yeux de ce présentateur, outrepassé une règle fondamentale à laquelle certaines gens lui ont dit de croire (car certaines personnes ont bien sûr intérêt à faire croire qu’il faut une autorisation avant d’être filmé !); mais s’il y a une loi en la matière, il faut savoir l’interpréter en conscience et si elle est juste à certains moments je vous rappelle qu’elle peut paraître inique et fausse à d’autres moments. Surtout dans le cas présent ou un inconnu était en train de recueillir la Lumière pour les siècles à venir et c’est ici que c’est à mon avis une faute que d’avoir brisé ce processus. Mais sans doute faudra-t-il suggérer que l’on modifier cette loi qui d’ailleurs se modifiera d’elle-même avec la vidéophonie dont je vous ai parlé plus haut et qui existe déjà sur internet.
Ce présentateur, que vous avez chargé de présenter tant de si brillantes personnalités, a dû certainement mériter, à vos yeux, une telle dignité et je serai heureux d’apprendre de vous quels sont ses mérites ou quels bons motifs lui ont permis de vous représenter et de figurer ce soir-là auprès de si excellentes personnes. Si vos motifs sont bons, je vous prie de m’excuser ; il doit y avoir des raisons pour une telle attitude et je vous prie de me les donner.
Mais voilà les faits (le destin) ont voulu que je ne sois pas arrivé à l’heure pour demander cette sacro-sainte permission! Or, hier soir j’étais venu en ami et je n’ai pas été traité comme tel – au contraire..
Mais je suis bien sûr prêt à comprendre ce que vous me direz pour expliquer les raisons qui pourraient justifier une telle inconduite à mon égard. Qui sait, une journée peut-être harassante ? La première présentations publique de sa carrière et du coup il ne savait plus comment se conduire ? Il a pu être impressionné par la situation imprévue et avoir peur d’être vu, lui, sur cette vidéo ? Quoique vous me direz pour l’excuser, dites-lui qu’il a fait le mauvais choix : celui d’insulter la lumière, et d’insulter vos invités à travers moi.
Je suis bien sûr prêt à l’indulgence car je sais malheureusement que certains hommes peuvent traverser des moments où ils ne sont pas au meilleur d’eux-mêmes et c’est regrettable. Je peux donc comprendre son attitude peu élégante mais je ne lui pardonnerai véritablement que s’il me demande sincèrement de l’excuser et s’il comprend la gravité de son acte et vous savez qu’il y a quelques noblesses à reconnaître ses torts !
Je suis néanmoins heureux de vous envoyer, ci-joint, la copie vidéo de cette soirée à toutes fins utiles qui aurait pu être si belle pour moi si j’avais également pu enregistrer le rabbin. Mais, comme un fait exprès, alors que je me réjouissais de conserver pour les générations à venir (et pour ceux qui étudieront ce pitoyable moment de l’histoire : le nazisme), en mettant à la disposition de tous, en vidéo, les propos du rabbin venu exprès de Genève, je dus interrompre mon œuvre que j’espère vous aurez compris de Salut Public. Si mon âme a été un peu affectée par cet événement (et vous vous en rendez compte par la longueur de cette lettre !) je me réjouis de ne pas avoir été blessé physiquement. Je dois ajouter ici que si M. Rachline n’avait pas été providentiellement présent, un forcené qui me poussait dehors violemment a dit vouloir casser ma caméra et a voulu en découdre avec moi. M. Rachline a fort heureusement calmé cet individu peu recommandable (je crois qu’il faisait apparemment partie du service d’ordre) et éviter de justesse une effusion d’un sang innocent. Je vous serai grès aussi de remercier de ma part Monsieur Rachline, qui se trouvait providentiellement là et qui a pu calmer ce violent personnage près à se jeter comme une hyenne sur un animal sans défense. Je suis d’autant plus reconnaissant à M. Rachline qu’il ne savait qui j’étais et qu’il l’a fait de façon naturelle : preuve qu’il existe encore en ce monde des êtres capables d’être des hommes. Monsieur Rachline et moi avons d’ailleurs sympathisé à la sortie, nous avons même découvert que nous avons des amis en communs.
En attendant votre réponse, veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes sentiments distingués.
Laury Granier
PS/ Vous comprendrez, bien sûr, que j’envoie un double de cette lettre aux invités du débat de cette soirée. Je l’enverrai bien sûr à M. Costa Gavras dont j’ai pu admirer le travail et le grand talent de metteur en scène. Vous comprendrez que j’ai à cœur de servir leur cause – la lumière – autant que faire ce peut ! J’ai toute confiance en sa bienveillante compréhension.