à

Monsieur Jean Rouch

Président de la Cinémathèque française

Paris le jeudi 8 janvier 1998

Cher Jean,

Suite à notre conversation de ce matin, je suis heureux de te demander ton aide pour Pierre Haffner, professeur de Cinéma à l’Université de Strasbourg.

Comme tu le sais, il a entrepris une réflexion à partir de ce monument de la roue d’Abel Gance. Le titre de son futur ouvrage (dont il est à la moitié du travail) est "la roue " : ein kinobildungsroman ou comment une conscience s’est fait entraîner par le cinéma et comment ensuite elle a tenté d’apprivoiser un film.

Pierre m’a fait part du refus qu’il a eu, en demandant à la Cinémathèque une copie vidéo de la roue dans sa version intégrale. Il semble que cela soit impossible - du moins à l’échelon auquel il s’est adressé: la personne n’a pas voulu comprendre que c’est à des seules fins d’études qu’il avait besoin de disposer de ce film. Elle lui a proposé de venir le visionner sur place. Mais lui, il a besoin de ce film pour des études minutieuses qui demandent de disposer du film librement et pendant de longues plages de temps. De plus, comme tu le sais, il est un peu coincé à Strasbourg.

Il a pensé que tu pourrais l’aider à obtenir enfin cette version (il ne peut pas se contenter de la version d’une heure et demie pour son travail, car tu sais qu’il porte un soin particulier à son étude et ne voudrait pas oublier d’étudier la plus longue des versions en détail). Il m’a demandé de t’en parler car il sait que tu es mon ami et que nous nous voyons souvent. Je te serai reconnaissant d’intervenir, comme tu le souhaites, au près de la direction des archives de la Cinémathèque. Peut-être seront-ils sensibles à la confiance que tu as en Pierre Haffner, à son prestige universitaire et qu’ils accepteront de déroger pour soutenir ainsi, enfin de compte, l’œuvre magistrale d’Abel Gance.

J’ai fait part à Pierre de notre crainte qui est peut-être aussi celle des autorités de la Cinémathèque: de voir sortir une copie vidéo d’un film en leur possession. Comme tu me l’as suggéré, il est prêt à signer un engagement écrit où il mentionnera qu’il n’utilisera ce film qu’aux fins de la seule étude et éventuellement à rendre la copie vidéo de ce film quand il aura terminé de le questionner pour son étude. (Bien sûr,  il est prêt à remercier, comme il se doit, dans son livre les personnes de la cinémathèque qui l’auront aidé à obtenir ce précieux support de travail). Bien sûr il est prêt à payer le montant du transfert vidéo s’il y a lieu.

Dans l’espoir que tu pourras faire quelque chose je te remercie.

Laury