Autour du vidéopoème: "La porte"
Midrash de la mer.
Cinquième porte: porte du ciel.
A mon réveil, je la filme qui dort toute nue et, pour la première fois de ma vie, je filme le corps nu de la femme que j'aime: ce sont des "arabesques folles" et j'ai l'impression que nous faisons l'amour par mon regard, par vos regards, à travers la caméra. Nous nous connaissons de toute éternité. Elle bouge dans son sommeil avec de petits gestes précis, mis en scène par nos âmes réunies, des gestes de reine, et toute parcelle de son corps offert crie l'amour, la femme.
Elle se réveille, il lui faut une robe car elle est pharaonne, une robe jaune or. Elle la trouve dans un magasin de la ville et les plis tombent en rayons autour d'elle.
La nuit, toujours à Olympe, je continue mon film de la veille et tout s'éclaircit en moi: je comprends mes errances, mes voyages, l'itinéraire de ma vie. Je comprends que je suis venu au Portugal pour achever un cycle. Les voyages dans tous les sens, que j'ai auparavant effectués, trouvent maintenant leurs raisons d'être.
Car d'ici partirent les navigateurs pour les pays où j'étais allé. Je contourne avec eux l'Afrique et découvre avec Marco Polo la route des épices. Je fais enfin le tour du monde avec les marins de la caravelle, le tour de la boule réfléchissante
que je filme en dansant sur le rythme de cette chanson portugaise, devant le grand miroir constellé de lumières clignotantes en forme de losange: Andromède.
Et je sais que, de loin, Henri (dit le Navigateur) pousse de son souffle les caravelles. Portugal, pays qui a percé le secret des Mers, pays de savoir et de connaissance, je suis ton fils.
Vingt-trois ans: au seuil de la découverte. Et je me souviens des portes déjà franchies: Constantinople dont le gouvernement s'appelait la Sublime Porte;
les pyramides aztèques dont j'escaladais les marches en croyant que chaque pierre était un seuil, un âge reconstitué, une initiation, comme la ville de Babylone, qui veut dire "Porte du Ciel", 7000 ans déjà; les Incas avec leurs temples à la lune et au soleil.
Et voici que je me souviens du toumi, couteau sacrificiel inca, du prêtre arrachant le coeur de sa victime, sur l'autel, au sommet de ces sortes de pyramides - ziggourats ouvertes sur tous les cieux…