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Le Monde 

(À propos de la mort de Philippe Léotard)

mardi 28 août 2001

Une carrière cinématographie dépensée sans calcul

Au CINEMA, comme dans les autres disciplines qu’aura traversées l’artiste au cours de sa carrière, l’image de Philippe Léotard a fini par se cristalliser dans une physionomie peut-être trop aisément identifiable : une voix éraillée, un visage en déconfiture, ébranlé comme celui d’un Bacon. L’image d’un type marchant perpétuellement au bord du gouffre, mais qu’une petite flamme celle du désir de vivre et de la conscience tour à tour amusée et douloureuse qu’il avait de lui-même - continuait de maintenir, miraculeusement, à flot. Le cliché de "l’artiste maudit " risque pourtant de masquer celui de l’artiste tout court, qu’il fut sans conteste au cinéma, au titre de second rôle prometteur dans le cinéma d’auteur des années 1970, avant d’accompagner en fugitive vedette la mutation du cinéma populaire dans les années 1980.

Sa carrière cinématographique est en effet pléthorique - elle s’étend sur près de trente ans et comporte plus de soixante films - et extrêmement variée. Elle débute par une figuration - un homme ivre - dans Domicile conjugal (1970) de François Truffant, immédiatement suivie de deux rôles chez ce dernier (Les deux Anglaises et le continent, 1971, et une belle fille comme moi, 1972), ainsi que chez Claude Sautet (Max et les ferrailleurs).

Son premier rôle important, il le doit à René Vauthier, qui le fait tourner dans Avoir vingt ans dans les Aurès (1971), film anticolonialiste où il incarne le salaud. Ce film, remarqué au Festival de Cannes, connaît un succès public qui permet à l’acteur d’enchaîner les rôles, chez les cinéastes aussi exigeants que Maurice Pialat (La Gueule ouverte, 1974), Alain Tanner (Le Milieu du monde, 1974) ou Patrice Chéreau (Judith Terpauve, 1978), mais également avec des réalisateurs plus appréciés du grand public, tels Yves Boisset (RAS, 1975. Le Juge Fayard, 1977) ou Claude Lelouch (Le Chat et la Souris, 1975 ; Le Bon et les Méchants, 1976).

Un César en 1983

C’est cette dernière veine, où il interprète de façon récurrente des inspecteurs de police, qui finira par l’imposer comme vedette, à l’occasion du succès de La Balance (1982) de Bob Swaim (plus de quatre millions d’entrées), où il incarne un petit proxénète veule. Il est élu meilleur acteur lors de la cérémonie des César 1983 pour son interprétation dans ce film, polar relativement décoratif qui fait par ailleurs main basse sur les palmarès. "Lamentable ", n’en titre pas moins Jacques Siclier dans Le Monde - qui constate que le palmarès n’a distingué ni le meilleur film de l’année ni le meilleur rôle de Philippe Léotard.

Ce sera dès lors tout à l’honneur de l’acteur de s’associer - parallèlement à ses rôles dans des productions prestigieuses, tels Le Paltoquet de Michel Deville ou Tchao Pantin (1983) de Claude Berri - à des œuvres plus risquées pour la carrière d’une vedette établie, comme La Pirate (1984) de Jacques Doillon, Jane B. par Agnès B. d’Agnès Varda, ou La Chair (1991) de Marco Ferreri. Sans doute que la carrière, au cinéma et ailleurs, n’était pas le souci premier de Philippe Léotard.

Sa dernière apparition cinématographique, aux côtés de Jean Rouch et Carolyn Carlson, témoigne de ce désintéressement, de cette générosité : La Momie à mi-mots (1998) de Laury Granier, davantage qu’un film, est un objet inclassable, une sorte d’essai poétique et expérimental réalisé avec des moyens de fortune dans un Paris transfiguré...

Jacques Mandelbaum

 

 

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