L’Hebdoscope (Strasbourg)
11 novembre 1998
Laury Aime, le peintre
Laury Granier, le cinéaste
Laury Granier, cinéaste, auteur de La Momie à mi-mots, définit le cinéma comme un grand tableau où se succèdent des images d’animation et où la caméra devient en quelque sorte " un pinceau électronique ". Si l’artiste s’autorise cette analogie c’est parce que le peintre n’est jamais loin du cinéaste.
Même s’il a choisi de signer ses tableaux du nom de Laury Aime, Laury Granier ne fait qu’un avec le poète qui se révèle derrière chaque image qu’elle soit peinte ou filmée.
La peinture de Laury Aime s’apparente à une démarche spirituelle. Penché sur ses miniatures, il retrouve cette concentration extrême propre aux enlumineurs du Moyen Age. Ses petites toiles de 35 cm sur 25 cm l’entraînent dans le jeu de l’infiniment petit, " à la frontière d’une autre dimension qui n’est pas perceptible par tous ", explique-t-il. L’état de peindre est pour lui " un état d’interrogation " dans lequel il investit jusqu’à son âme dans une quête inlassable de la perfection. L’emploi de l’or et de l’argent magnifie et stigmatise, tout à la fois, ce point d’orgue qu’il nomme " cristal de neige ".
Dans ce jeu, qui parfois le dépasse, Laury Aime se plaît à relire cette peinture qu’il interprète à l’instar d’une écriture codée. N’est-ce pas le nom de Dieu que l’on peut déchiffrer à travers ces arabesques de couleurs très proches de la calligraphie arabe ? Et ce visage qui surgit, est-ce celui d’un ange, d’un démon ou un auto-portrait ? Libre à chacun, nous dit le peintre, " d’inventer son propre rêve à partir des images données ".Laury Aime évoque aussi la théorie du " fractal " où " tout est dans tout " et où les frontières spatio-temporelles s’abolissent. L’artiste, dans cet entre-deux propre au créateur, tient à la fois du démiurge et de l’enfant.
Démiurge, il a le sentiment de le devenir lorsque son ordinateur lui donne la faculté d’agrandir en une journée les miniatures qu’il a mis six mois à peindre. Ces " infographies ", véritables cartes géographiques de l’âme, donnent alors un nouvel éclairage à ses œuvres. Laury Aime pense être arrivé à ce croisement où " l’abstraction rejoint la figuration ". Tel un enfant, il voit apparaître " des choses comme dans les murs ou les nuages ". Il renoue ainsi avec le poète et nous tend le miroir de " sa " création du monde où chacun peut trouver sa place, car comme le souligne l’artiste " le je est pluriel ". La peinture de Laury Aime est une réflexion sur l’art dans sa totalité. Les correspondances avec la musique, la danse, la poésie abondent. Elles ouvrent les portes et les fenêtres de l’imaginaire à tous les vents de la fantaisie. Ainsi ses peintures, véritables jardins de l’âme, pourraient inspirer le travail d’un couturier et faire naître des robes légères et virevoltantes. Les œuvres de l’artiste, qui sont des chorégraphies visuelles en soi, invitent tout naturellement à la création d’un ballet... La musique est l’une des sources essentielles d’inspiration de Laury Aime. C’est ainsi qu’il a mis deux ans à peindre non pas un piano, mais sur le piano lui-même où un ange passe en courant.
Chaque œuvre semble contenir en elle, le germe d’une nouvelle fête où tous les sens sont conviés. C’est peut-être là le secret de Laury Aime, il a gardé de la magie de l’enfance l’art de nous surprendre et de nous émerveiller.
Françoise Urban Menninger
Turbulences Vidéo
(15 novembre 1998)
La Momie à mi-mots, film du cinéaste-peintre Laury Granier, avec Carolyn Carlson dans le premier rôle, sera diffusé à Strasbourg (au cinéma Odyssée, Tel: 0388323938) à partir du mercredi 4 Novembre, et à Paris (au cinéma le Denfert, tel : 0143214101) à partir du 18 novembre. Ces projections sont associées à des expositions du même Laury Granier.