Accueil

 

" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique. 

Genèse d’un film.

 

Sommaire

Page précédente

Page suivante

 

V. 3. m. Un exemple de montage très difficile - la séquence en sept parties, dite "des cartes"

Cette séquence a donc elle aussi fait l’objet de longs travaux dont je souhaite maintenant approfondir la teneur. Je dus, pour la lier à la précédente, retravailler en détail les sept ou huit parties qui la composent. Je voudrais montrer ici que c’est finalement grâce aux associations de couleurs, de mouvements ou de matériaux, que j’ai pu monter toutes les séquences autour de la séquence leitmotiv "de la parque yo-yo".

La structure métallique du manège ne faisait-elle pas penser à la structure métallique de la harpe? Les cordes que les fillettes tirent, pour faire tourner le manège, ne font-elles pas penser aux cordes de la harpe? Et celles que les anges tirent, à leur tour, ne font-elles pas penser aux fils des yo-yos? Le visage peint sur le tronc d’arbre ne rappelle-t-il pas le masque de "diablada" que porte Carolyn momifiée?

Ces deux séquences (celle des cartes sous le manège et celle de la parque-yo-yo) pouvaient être rassemblées en une seule grâce à des associations d’images. J’avais décomposé la séquence du manège en petites séquences autonomes et je devais d’abord être sûr de chacun des plans que je voulais garder, avant de commencer à trouver les endroits où insérer la séquence centrale "de la parque yo-yo".

Lors de la projection à la Cinémathèque, ces deux grandes séquences étaient dissociées: il y avait d’une part la séquence dite "des cartes" et celle dite de "la parque-yo-yo". Elles m’avaient toutes deux semblé trop longues. On attendait trop longtemps l’arrivée de la scène de "la parque yo-yo". Placée après la séquence "des cartes", la séquence de "la parque-yo-yo" était une coupure, car j’avais imaginé, comme suite à cette séquence, la séquence des cerfs-volants, qui était le prolongement de la séquence des cartes.

Pour le quatrième montage, il fallait éviter de laisser pendant toute la séquence des cartes le spectateur sans nouvelle de la momie - d’autant plus que les "dernières nouvelles" de celle-ci remontaient à la séquence du rituel nocturne, avant la séquence de l’alpiniste.

J’ai compris au cours de ce quatrième montage que le cinéma, comme la bande dessinée ou l’écriture, la peinture ou la musique, permet de faire entrer, au milieu d’un motif ou d’une séquence, des images qui se rapportent à un autre espace-temps, sans pour autant faire oublier l’espace-temps dans lequel on se trouve. Cela pourrait correspondre à un "pendant ce temps là, ailleurs" pour un récit écrit.

Grâce à ces introductions d’une séquence dans une autre, une alternance naissait et le spectateur pouvait suivre deux histoires à la fois. Il comprenait que ces deux séquences se passaient en même temps et que l’une était liée à l’autre.

Je finissais, après de longs mois de travaux et de nouvelles recherches dans les chutes, à aboutir aux ellipses nécessaires pour donner sa dynamique à l’ensemble. La progression dramatique était liée aux effets de rythme et au retour d’un leitmotiv que je faisais varier progressivement.

Le leitmotiv, c’était encore bien sûr, la séquence de "la parque-yo-yo" autour de la momie, de Margret à la harpe, et du danseur de yo-yos.

Il s’ensuivit la création d’une séquence beaucoup plus longue que les précédentes, qui avait pour centre le leitmotiv. Aucun de mes personnages, aucune de mes "couleurs sur la palette" n’avaient été abandonnés; chacun d’eux était suivi, du début de la séquence de l’observatoire, jusqu’à la séquence de leur arrivée, comme des mages, après la résurrection.

L’imbrication des plans de la séquence de "la parque-yoyos", avec ceux de la séquence des cartes, avait été rendue possible par ce travail très précis de recherche de la durée de chaque plan dans cette dernière séquence.

Je m’apercevais, petit à petit, que j’avais, là aussi, bien fait de remettre mon ouvrage une nouvelle fois, sur le métier.

J’avais l’impression d’être un sculpteur dégageant de la pierre une statue, dont je comprenais que chacun des morceaux faisait parti de l’ensemble.

Décidément, le troisième montage n’était pas très réussi, car il n’était pas encore parvenu à unir les différentes parties, à les rendre chair du même bloc. Il n’avait pas de centre, comme le manège, mais il avait permis de constituer, une par une, les pièces du manège.

Le film, grâce à ces nouveaux efforts, retrouvait son centre: la momie. C’était bien autour d’elle que tous s’affairaient, pour lui permettre de retrouver un jour son souffle, sa vie, son ouïe et enfin la joie. Je compris, au terme de ce nouveau montage, liant la séquence "des cartes" à celle de "la parque-yo-yo", que je devais aussi songer à relier la séquence de l’observatoire, à ce nouvel ensemble.

Le leitmotiv, danseur de yo-yos-momie-harpiste, était enfin devenu la trame, le tissu principal dans lequel les fils de différentes couleurs entraient et où les broderies, les boutons, le col et les manchettes de ce vêtement de séquence prenaient place.

La séquence de la "parque yo-yo" était la base d’une séquence beaucoup plus longue et plus importante, qui devrait s’intituler "l’œuvre des mages", et qui ne finirait qu’au début de la séquence de la résurrection de la momie.

Cette séquence de "l’œuvre des mages" était constituée de plus de trente petites parties, en quatre séquences imbriquées les unes dans les autres, autour du thème principal enfin retrouvé.

J’avais donc, au cours de ce quatrième montage, l’impression d’assister en archéologue, et en premier spectateur, à la renaissance d’une momie, qui avait pris l’aspect du film lui-même. Si cette nouvelle étape de la renaissance de cette momie-film était terminée, il fallait que, de la même manière, je m’attelle à l’étape suivante, pour connaître un jour à quoi ressemblerait la voix de cette momie, le son de mon film, pour enfin ressusciter complètement le film La momie à mi-mots, le jour de la première. Mais bien sûr ce jour était encore loin!

Sommaire

Page précédente

Page suivante

 



Copyright © 2000 Lorimage. Tous droits réservés.
Révision : 11 avril 2003