Le Monde
Jeudi 19 novembre 1998
La Momie à mi-mots
par Jacques Mandelbaum
Laury Granier, l’auteur de ce film qu’on peut qualifier d’expérimental, a un parcours peu conventionnel. Docteur en art, peintre, réalisateur de courts métrages, voilà qu’il affronte avec un certain panache l’épreuve commerciale du cinéma, sans autre viatique que l’aide de quelques organismes culturels et sa propre opiniâtreté. Totalement dépourvu de dialogues, construit à la façon d’une partition visuelle dont le contrepoint serait à la fois la musique et la peinture, La Momie à mi-mots se veut un essai poétique dont l’ambition consisterait à renouer avec l’expressivité d’un langage perdu, celui du cinéma muet. Tourné à Paris avec des moyens de fortune, le film accumule les figures de style (caméra portée, accéléré, ellipses, montage rapide, faux raccords) au service d’un récit aléatoire et métaphorique où quelques célébrités (Carolyn Carlson, Jean Rouch) semblent surtout livrer leur caution artistique au projet. Aussi sympathique celui-ci soit-il, prônant notamment la tolérance et l’abolition des frontières, il n’est pas certain que le cinéma, peu ou prou réduit à un exercice de mime en plein air, y trouve vraiment son compte.
Jacques Mandelbaum
Film français de Laury Granier. Avec Carolyn Carlson, Jean Rouch, Philippe Léotard. (0h45)