" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique.
Genèse d’un film.
II. Deuxième partie: Le pré-tournage
Méthode
Avant de parler de mon travail avec les acteurs, pièce maîtresse de cette partie, j’essaierai de rendre compte de mon travail de producteur, en soulignant la patience et la rigueur, qu’il a exigées de moi.
Comment raconter mes rencontres avec les acteurs, et mon travail avec eux? Je pourrais raconter cela très sobrement, en donnant peu de détails, et en axant mon propos sur notre travail commun. Mais je ne crois pas que ce parti pris ascétique puisse rendre compte authentiquement de cette expérience. Au risque d’ennuyer parfois, je préfère choisir de prêter attention aux "petits riens" qui constituent l’essence du cinéma, lui donnent sa chaleur. En somme, ce pourquoi j’ai finalement choisi d’essayer de faire ce métier: le lieu de la rencontre, l’état psychologique des êtres, les repas et les paroles échangés, l’intonation des voix, les parcours effectués en leur compagnie... Voilà ce qui constitue pour moi la vérité d’une telle expérience. Elle mérite, me semble -t-il, qu’on s’y attarde. Ce que je voudrais suggérer, par ces descriptions précises des rencontres (qui ne feront l’économie ni des artichauts, ni des rollmops d’Alain Cuny, ni de mes dents de sagesse surgies à un moment crucial de mes relations avec Carolyn!), ce sont les coulisses d’un film: l’énorme toile d’araignée qu’il faut patiemment, et passionnément tisser avec des êtres de chairs qui eux aussi rêvent de "changer la vie" (Rimbaud).
Dans une première phase spontanée, mon film m’a donné l’impression de se créer de lui-même, au gré du choix et des rencontres des acteurs. J’avais de plus en plus l’impression d’être l’instrument du film. Tout en tenant le fil d’Ariane du scénario, je soudais les uns aux autres des éléments imprévus, qui surgissaient dans mon quotidien et je les absorbais.