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" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique. 

Genèse d’un film.

 

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II. 5. b. 6. - Création d’accessoires et de décors

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J’ai moi-même mis beaucoup la main à la pâte pour la création des décors et des accessoires:

C’est ainsi, par exemple, que j’ai fait la baguette magique à partir d’une canne de billard (qu’il m’a fallu obtenir gratuitement) et d’un œuf en verre soufflé, offert par Margret Brill à San Remo, lors de l’enregistrement des musiques pour harpe. Pour cette baguette magique, je me suis inspiré d’une reproduction d’un dessin d’Athanase Kircher 128. J’ai trouvé plus tard, pour mon bonheur, un autre dessin de "baguette magique" dans une vignette de Winsor Mc Cay pour sa bande dessinée Little Nemo in Slumberland. Le héros, Little Nemo, y est représenté avec une baguette qui ressemble à la mienne. En les touchant avec cette baguette, il réalise les désirs de tous les enfants pauvres, qu’il rencontre dans un bidonville. Pour réaliser cette baguette, j’ai dû demander conseil à un décorateur de théâtre, Daniel Louradour, que je connais depuis longtemps. Celui-ci m’a proposé plusieurs dessins, mais je ne les ai finalement pas utilisés.

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C’est moi encore qui ai fait couvrir d’une fine couche de plastique transparent et collant les 12 cartes du monde que j’avais obtenues de l’Institut Géographique National, en contrepartie d’un clip vidéo que j’avais tourné à l’occasion du cinquantenaire de l’I. G. N.129. Pour ce faire, j’ai obtenu la collaboration d’une entreprise de plastification.

J’ai entièrement poli à la main la grande plaque de métal qui devait servir à des réflexions et des déformations d’objets.

Bien entendu, j’ai également fait appel à des collaborateurs. J’ai déjà dit que Patrick Collette avait construit, selon mes vœux, trois paires d’ailes d’ange. Je m’étais inspiré de la forme découpée et originale des oreilles du masque de "diablada" porté par la momie 

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que j’avais voulu agrandir: c’est ainsi qu’on a l’impression que les anges courent avec des ailes qui sont de gigantesques oreilles, ou que les oreilles du masque sont des ailes.

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Mais outre l’épopée des autorisations gratuites de tournage en décor naturel, dont j’ai déjà parlé, c’est l’aventure de la confection des cerfs-volants qui m’a demandé le plus de temps et de l’énergie.

Mon idée était de faire deux très grands cerfs-volants. Chaque cerf-volant devait être confectionné à partir de 12 grandes cartes plastifiées constituant le planisphère. Je voulais qu’on ait ainsi la sensation que le monde lui-même se mettait à voler. Restait à réaliser ces cerfs-volants géants. Je me suis mis en quête d’une personne capable de les construire. Après de nombreuses recherches infructueuses (devis trop coûteux), j’ai finalement rencontré l’homme qu’il me fallait, par l’intermédiaire de son frère, Jean-Marc Fabre, ancien lauréat du G. R. E. C. , que François Barat, (délégué général du G. R. E. C. ) m’avait signalé comme éventuel cadreur. Celui-ci, trop pris par ses propres réalisations, n’a pas pu être cadreur sur mon film mais m’a dit, dans la conversation, que son frère était l’un des meilleurs cerfs-volistes français. C’est ainsi que j’ai rencontré Pierre Fabre, grâce à qui mon souhait a pu être réalisé. La forme rectangulaire des deux planisphères a imposé la forme de deux cerfs-volants japonais, que Pierre Fabre connaissait pour avoir fait un stage au Japon, où il avait appris son art. Il n’avait encore jamais réalisé cette forme-là et le défi nous plaisait à tous deux.

Dans son appartement, où les murs et les plafonds étaient couverts de cerfs-volants multicolores venus du monde entier, aux formes les plus surprenantes, nous avons beaucoup réfléchi ensemble au matériel à utiliser, suffisamment léger pour faire voler une telle surface et suffisamment lourd pour que l’armature ne se rompe pas.

J’ai dû trouver, après bien des difficultés, un sponsor (l’Ecole des Beaux-Arts de Rueil-Malmaison) pour l’achat de ce matériel très spécial. J’ai par ailleurs dû faire venir les fils et les cordes d’une entreprise spécialisée de province.

Avant de procéder à l’assemblage des cartes en cerfs-volants et avant de les faire plastifier, j’ai souhaité que ces deux très grandes cartes du monde, faites chacune de douze pans, soient peintes par des artistes. Dès la première version du scénario, cette idée des cartes du monde librement revisitées par des peintres s’était imposée à moi. J’ai confié la première carte au peintre L. F. G. qui a inventé dans les mers du globe, là où il n’y avait pas d’île, des îles ayant la forme d’oiseaux et d’animaux fabuleux, dessinées puis recouvertes de feuilles d’or et d’argent 130. (Jean Rouch a cru y reconnaître "le renard pâle" des Dogons). La seconde carte a été peinte par Roméo de Jésus Géronimo, à partir d’une maquette que j’avais peinte moi-même avec soin et qui était aussi le tableau que le personnage du peintre (que j’interprétais) devait peindre sous la tour Eiffel, dans la scène de la Renommée. Sur cette maquette, peinte sur un plan du monde à une échelle plus réduite, j’avais retrouvé dans la forme des continents et des mers la forme de mon masque de "diablada" vu de profil. C’est ainsi que, par exemple, la ville de Rome coïncidait avec l’œil de mon masque. Mais bien vite, d’autres masques surgirent dans les profondeurs marines, semblant se poursuivre sans cesse dans les eaux et sur les terres, tout autour du globe comme les vents observés autour de notre globe, par nos satellites météorologiques. Grâce à la surimpression de la carte du globe et du masque de la "diablada", le spectateur devait avoir l’impression que, avec le cerf-volant, c’était le masque de momification lui-même qui s’envolait et qui posait ainsi les prémisses de la résurrection de la momie. La réunion des deux cerfs-volants dans le ciel devait symboliser une unité retrouvée.

Ne disposant pas d’atelier, c’est sur les murs de mon propre appartement que Roméo de Jésus a peint, d’après ma maquette, le cerf-volant de la "diablada". Une fois les cerfs-volants construits, j’ai dû trouver une grande salle (finalement une salle de théâtre, à cause de la taille des cerfs-volants). Dans cette salle, Pierre Fabre (qui devait participer à un combat de cerfs-volants en Thaïlande, au moment de mon tournage) m’a appris, ainsi qu’aux accessoiristes, à monter ces énormes cerfs-volants. Je les avais voulus pliants, afin que nous puissions les transporter facilement sur les lieux de tournage dont nous ignorions encore l’emplacement.

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128 Joscelyn Godwin, Athanasius Kircher, éd: un livre de la vue, 1979, p. 38.

129 Laury Granier, Carte de France Linoléum, vidéo-clip-cult réalisé à l’occasion du cinquantenaire de l’I. G. N. . Il s’agit d’une chorégraphie des voyageurs dans la gare de l’Est, qui marchent sur la plus grande carte de France jamais réalisée, et déployée sur le sol du hall de la gare.

130 Ce cerf-volant a été exposé au bilan du film ethnographique 1991 (dont j’ai réalisé l’affiche) et à l’exposition "Piscines" de L. F. G. en 1994.

 

 



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Révision : 11 avril 2003