" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique.
Genèse d’un film.
IV. 1. c. Le tournage de la brocante
Au cours d’une après-midi de juillet 1991, je vis qu’une brocante s’installait autour du square Marco Polo et de la fontaine Carpeaux. La coïncidence entre cette brocante et le lieu-même de mon tournage me donna à réfléchir. En une après-midi, ma décision fut prise: je devais rajouter une séquence de plus à mon film! Carolyn apercevrait au cours d’un délire supplémentaire, devant la fontaine Carpeaux, au milieu d’une brocante, une grande partie des accessoires qu’elle avait rencontrés dans les scènes précédentes du film, vendus et bradés: une sorte de mise en abîme, dans la lignée du poème Solde de Rimbaud.
"À vendre les Corps sans prix, hors de toute race, de tout monde, de tout sexe, de toute descendance! Les richesses jaillissant à chaque démarche! Solde de diamant sans contrôle!(...)
- À vendre les Corps, les voix, l’immense opulence inquestionable, ce qu’on ne vendra jamais. Les vendeurs ne sont pas à bout de solde! Les voyageurs n’ont pas à rendre leur commission de si tôt! " 147
Il fallut du jour au lendemain réunir une petite équipe technique dont heureusement les membres pressentis étaient généralement libres. Je dus obtenir l’accord de l’organisateur de la brocante pour monter un faux stand, juste devant l’entrée menant à la fontaine Carpeaux, afin de l’avoir comme fond. Il fallut également trouver un figurant capable de jouer le rôle du brocanteur et une jeune fille pour l’assister dans cette fonction.
Nous tournâmes, avec la Bolex, toute une série de plans de cette nouvelle séquence, que j’avais découpée la veille au soir.
Le résultat fut catastrophique: les techniciens du laboratoire refusèrent de tirer une copie de travail: tout le négatif était filé à la prise de vue. Je dirai plus tard comment, au cours du quatrième montage, j’ai finalement fait développer ce tournage et comment j’ai pu utiliser le filage comme un atout.
147Rimbaud, Oeuvres, Classiques Garnier, 1981, p.293