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" La momie à mi-mots": Un essai cinématographique. 

Genèse d’un film.

 

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VI. 3. La momie à mi-mots: une école de vie

VI. 3. a. "Petit à petit"165

En songeant que sept ans de ma vie ont découlé d’une simple conversation matinale dans un café, avec Jean Rouch 166, je puis me dire que la vie est surprenante. L’encouragement d’une petite aide financière, au départ, m’a donné la force de me battre pour en obtenir bien d’autres, et finalement réaliser un scénario en perpétuelle métamorphose.

J’ai été humblement le serviteur, l’instrument de cette aventure de film. Il ne devait être au départ qu’un court métrage d’une dizaine de minutes. Je croyais d’ailleurs qu’il serait terminé en trois mois, tout au plus. Jamais je n’aurais pensé qu’il me faudrait sept ans pour le terminer, et qu’il deviendrait la partie principale de ma thèse.

J’ai voulu créer une sorte de rêve, sous la forme d’un film. Je l’ai réalisé moins en maître d’œuvre qu’en serviteur, instrument d’une sorte de jeu de piste, qui se terminera bientôt par le tournage du générique et des panonceaux, leur intégration dans le film après leur développement, la réalisation du montage du négatif, l’étalonnage du film et la réalisation de la copie 0 de projection.

Ce film m’a permis "petit à petit" de m’améliorer, de mûrir et de m’enchanter à nouveau. Faire un film a constitué aussi un apprentissage de la vie, sous de multiples facettes. Ce film est donc aussi pour moi comme un Bildungsroman (roman de formation) l’histoire d’une maturation: lorsque je l’ai commencé j’avais vingt-six ans, j’en ai maintenant près de trente-trois.

Le film a donné lieu, à chaque instant, à des réflexions qui ont touché des domaines variés de l’existence quotidienne.

Ce fut aussi un pari envers moi-même, et mon goût du risque 167 a été souvent sollicité. Il a fallu monter le vaste et long escalier qui, marche par marche, étape par étape, a conduit à la réalisation de ce pari de papier.

Comme je l’ai exposé, au cours de ce travail, la première aventure a été celle de l’écriture de l’histoire, où la réflexion a porté sur des idées, des situations, des lieux imaginaires, des personnages de papier, auxquels je me suis attaché au point de désirer les voir s’incarner dans des lieux tangibles. Vinrent ensuite le travail de producteur, les réflexions d’ordre financier sur l’adéquation du projet et du réel. Le projet était-il viable ou non? Comment s’ingénier, avec très peu de moyens, à mettre au monde le monde que l’on porte en soi? Suivirent la préparation au tournage, difficile à cause de la nécessité constante de choisir (quels lieux, quels acteurs, quels costumes?) et la phase d’organisation technique (autorisations de prises de vues, négociations pour le prêt de matériel, rassemblement des acteurs). Arrivèrent les tournages, avec leurs cortèges d’implications concrètes (problèmes techniques, rapports avec une équipe), et l’exaltant travail de la mise en scène, et de la direction d’acteurs, etc.

Puis le montage où j’ai disposé d’images qui n’avaient plus rien à voir avec la parole et l’écriture. Il a impliqué le courage de repartir à zéro, une totale remise en cause de tout ce que j’avais pu écrire ou dire, dans les phases précédentes.

J’ai vu, pour ma part, le montage, comme un travail d’archéologue, ou de spéléologue, qui découvre et reconstruit son film dans le noir de sa salle, de sa caverne, à mesure qu’il avance.

Enfin les réflexions sur la musique, avec ce qu’a impliqué le contact de l’univers des sons, qui doivent toucher non seulement l’oreille, mais aussi la peau (Michael Lonsdale m’a fait remarquer récemment que l’on écoute aussi avec la peau), c’est-à-dire avec tout l’être.

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165 Ce titre est un hommage joueur, à la chanson "Petit à petit, j’aurai mon building", dans un film de Jean Rouch.

166 Voir introduction et la description du petit déjeuner décisif avec Jean Rouch.

167 Pour la notion de "risque", voir l’introduction.

 

 



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Révision : 11 avril 2003